Baronne de
Sternberg
Maria Stella Sternberg
Biographie |
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Naissance |
16 avril 1773 |
Décès |
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Nom dans
la langue maternelle |
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Nationalité |
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Activités |
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Père |
Lorenzo
Chiappini (d) |
Mère |
Vencenzia
Viligenti (d) |
Fratrie |
Adélaïde
d'Orléans |
Conjoints |
Thomas Wynn |
Enfants |
Thomas Wynn (en) |
Maria-Stella Petronilla Chiappini, par son mariage Lady
Newborough puis baronne de Sternberg, est née le 16 avril 1773 à Modigliana (Italie) et morte le 28 décembre 1843.
Elle est à l'origine d'une énigme
historique, puisqu'elle affirma être la fille du duc de Chartres, Louis
Philippe d'Orléans (1747-1793), futur Philippe Égalité, et de la
duchesse, née Louise
Marie Adélaïde de Bourbon ; dans ce dessein, elle chercha à
contester la naissance, en octobre 1773,
au Palais-Royal, du duc
Louis-Philippe d'Orléans (futur roi des Français Louis-Philippe Ier) et à se
faire reconnaître comme la fille légitime du duc et de la duchesse de Chartres.
Sommaire
·
1Une aristocrate
d'humble origine
·
3Une énigme
partiellement résolue
o 3.2Une ascendance
mystérieuse
Une aristocrate d'humble origine[modifier | modifier le code]
Maria-Stella Petronilla est née le 16 avril 1773 à Modigliana, petite ville italienne située dans
les Apennins, appartenant au Grand-duché de
Toscane (Romagne Toscane) mais dépendant du diocèse de Faënza,
dans les États pontificaux.
Son père, Lorenzo Chiappini (1739 + 1821), est geôlier, et sa mère se nomme
Vicenza Diligenti (1745 + 1820). Plus tard, Lorenzo Chiappini deviendra chef de
la police de Florence, où il mourra
en 1821.
Un autre enfant naît au sein du ménage
Chiappini : un garçon, Thomas Chiappini, qui deviendra avocat à Florence.
Maria-Stella est remarquée par un
aristocrate anglais, Sir Thomas Wynn of Glynllifon, Lord Newborough (1736-1807),
dont la famille descend des anciens princes du Pays de Galles ; il l'épouse et décède en
lui laissant, outre deux fils, une immense fortune. Maria-Stella se remarie
en 1810 à un aristocrate russe, le baron de
Sternberg, dont elle aura un fils.
Une substitution d'enfants[modifier | modifier le code]
En 1821,
peu de temps avant de mourir, Lorenzo Chiappini révèle par écrit à sa fille
qu'il n'est pas son vrai père et qu'il a échangé à sa naissance, moyennant
finances, le garçon que sa femme lui avait donné contre la fille que l'épouse
d'un homme de haute naissance, de passage à Modigliana, avait mise au monde. La
lettre est remise à Maria-Stella peu de jours après la mort de son père.
Enquête[modifier | modifier le
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De retour à Modigliana, Maria-Stella
entreprend, par de minutieuses recherches, de reconstituer les évènements qui
s'y sont déroulés en 1773.
Elle apprend ainsi que la châtelaine des
lieux, la comtesse Borghi, accueillait fréquemment un couple d'aristocrates,
appelés comte et comtesse de Joinville. Le comte de Joinville serait alors
entré en contact avec le geôlier Chiappini et, prétextant qu'il avait
impérativement besoin d'un héritier pour toucher un gros héritage, l'aurait
persuadé de procéder à un échange : si l'enfant à naître de la comtesse
était une fille, et si celui à naître de l'épouse Chiappini était un garçon,
les nouveau-nés seraient échangés. Chiappini aurait accepté, moyennant une forte
rétribution et Maria-Stella fut déclarée aux autorités locales comme la fille
de Lorenzo et Vicence Chiappini, alors qu'elle était en réalité la fille du
comte et de la comtesse de Joinville. L'échange aurait eu lieu au Palais Borghi
(palais du xive siècle,
toujours existant).
Elle apprend aussi que cet échange a été
connu des habitants de la région et a provoqué une véritable émeute :
poursuivi par la clameur publique, le comte de Joinville avait dû se réfugier
au monastère de Brisighella (voisin de Modigliana), où il fut arrêté puis
retenu pendant trois jours comme otage dans la Maison commune jusqu'à ce que
l'intervention des autorités locales permette sa libération, puis son départ
avec son épouse et l'enfant.
Forte de ces témoignages, Maria-Stella
n'a aucune peine d'obtenir, de la part du tribunal ecclésiastique de Faenza, la rectification de son état
civil : le 29 mai 1824,
ce tribunal ordonne que l'on rectifie son acte de naissance en la portant
« fille des époux Joinville ». Fait étrange : le
grand-duc de Toscane écrira au curé de Modigliana pour interdire la
transcription du jugement, s'opposant ainsi à la reconnaissance de l'échange
...
Auparavant, en juillet 1823,
elle a fait paraître une annonce dans plusieurs journaux dont La Quotidienne dans laquelle elle
fait part de sa recherche d'un certain Louis, Comte de Joinville. Cette annonce
intrigua le prince Louis Philippe car son père Philippe Égalité se faisait
appeler Comte de Joinville lorsqu'il voyageait incognito1.
Maria-Stella d'Orléans ?[modifier | modifier le code]
De toute évidence, le comte de Joinville
était un homme de très haute naissance, connu et respecté du gouvernement
toscan (Lorenzo Chiappini fut nommé capitaine des Gardes à Florence, dès 1780,
le grand-duc de Toscane s'opposera à ce que le curé de Modigliana procède à la
rectification du registre des baptêmes ordonnée par le tribunal ecclésiastique
de Faenza). Maria-Stella se convainc que le comte de Joinville, son père, n'est
autre que Philippe
d'Orléans, futur Philippe Égalité, et que Louis-Philippe,
enfant substitué destiné à assurer la lignée des Orléans, n'est qu'un
usurpateur.
Sa théorie se fonde sur les éléments
suivants :
·
le titre de comte de Joinville appartient à la famille Orléans ;
·
Philippe d'Orléans a effectué, notamment en Italie, de nombreux voyages
sous le nom de comte de Joinville ;
·
l'emploi du temps de Philippe et Adélaïde d'Orléans indique qu'ils
pouvaient se rendre en Italie en avril 1773,
pour permettre à la duchesse d'accoucher et procéder à la substitution.
Maria-Stella demande alors aux tribunaux
français d'accorder l'exequatur à la décision du tribunal de Faenza, puis de la
reconnaître comme la fille légitime de Philippe d'Orléans. Ses demandes sont
refusées, en partie grâce aux actions de son frère, Thomas Chiappini, qui
parvient à faire contrecarrer, par les tribunaux florentins, la décision rendue
à Faenza. Thomas Chiappini avancera comme argument que son père, paralysé de la
main droite, n'a pu être l'auteur de la lettre adressée à Maria-Stella et que
ce document est donc un faux, argument que Maria-Stella parviendra sans mal à
renverser.
Maria-Stella meurt le 28 décembre 1843,
en état de léger trouble mental, sans cesser de clamer son appartenance à la
famille Orléans. Elle est inhumée à Paris,au cimetière Montmartre. Dès sa mort,
l'ensemble de ses papiers personnels sera saisi par la police.
De nombreux pamphlets et ouvrages seront
ultérieurement publiés par les opposants à la monarchie de Juillet afin
d'accréditer l'histoire de la substitution de « Marie-Étoile
d'Orléans » contre « le fils Chiappini ». L'affaire renaîtra
essentiellement en 1883, après la mort d'Henri d'Artois, « comte de
Chambord », permettant aux légitimistes de contrer les prétentions
de la famille Orléans à la succession au
trône de France.
Une énigme partiellement résolue[modifier | modifier le code]
Noble, mais pas Orléans[modifier | modifier
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L'historien français André Castelot, dans son ouvrage consacré
à Philippe
d'Orléans, a démontré que Maria-Stella ne pouvait être la fille de
Philippe d'Orléans : les registres et archives de la Cour de France,
conservées aux Archives nationales,
démontrent en effet que si Philippe d'Orléans pouvait avoir amené son épouse à
Modigliana, au cours du mois d'avril 1773, il lui fut impossible de repartir la
chercher.
Quant à Adélaïde d'Orléans, il est
impossible qu'elle ait été enceinte avant le printemps 1773 (son
état aurait été nécessairement révélé lors de son entrée dans la
franc-maçonnerie, en février 1773, au cours de laquelle elle devait se
présenter en vêtements simples) et donc de donner le jour à un enfant
en avril 1773.
Une grossesse commencée en janvier de
cette même année et aboutissant, en octobre suivant, à la naissance de
Louis-Philippe est en revanche tout à fait possible.
L'étude des archives royales, ainsi que
des archives de la famille Orléans conservées aux Archives Nationales, permet
également d'écarter toute idée d'une naissance dissimulée de l'enfant Orléans
en avril 1773, naissance qui n'aurait été révélée que seulement six mois
plus tard.
Une ascendance mystérieuse[modifier | modifier le code]
Il est acquis aujourd'hui que
Maria-Stella n'est pas la fille de Lorenzo et Vicenza Chiappini et qu'une
substitution d'enfants a réellement eu lieu, en avril 1773 à
Modigliana.
Selon l'historien André Castelot, le
véritable père de Maria-Stella aurait été un souverain local (Este, Parme,
Modène, Deux-Siciles, Toscane) ou - plus vraisemblablement - d'un membre d'une
famille princière italienne, qui aurait utilisé le nom de comte de Joinville
pour dissimuler sa véritable identité - laquelle était connue des autorités
locales - soucieux d'assurer la pérennité de sa lignée.
Selon Maurice Vitrac, un dossier trouvé
dans les Archives de Brisighella contiendrait un certain nombre de lettres,
écrites par le vice légat de Ravenne au gouverneur Niccolo Perelli, démontrant
que Maria-Stella aurait été la fille d’un aristocrate de Rimini, le comte Carlo
Battaglini ( + 1796) et d’une femme inconnue, probablement sa maîtresse désireuse
d'éviter un scandale en dissimulant son accouchement. Il est toutefois
difficile de comprendre pour quelle raison le comte et sa maîtresse auraient
procédé à cet échange de nouveau-nés, qui ne dissimulait pas l'accouchement et
créait, en outre, un scandale ...
Il est probable que le "comte de
Joinville" ait été, en réalité, un membre d'une haute famille de
l'aristocratie toscane dont l'épouse, féconde en filles (comme il l'avouera
lui-même dans une lettre écrite postérieurement au prieur de Brisighella), ne
lui avait pas encore donné le fils qu'il souhaitait pour perpétuer sa
lignée ; la circonstance que la substitution ait eu lieu au palais Borghi
(et non au palais prétorien, où résidaient les époux Chiappini ainsi que les
Joinville) est curieuse, et pourrait laisser penser que l'enfant adoptée par
les Chiappini était, en réalité, la fille adultérine de la comtesse de
Joinville et du comte Borghi (Maria-Stella, dans ses Mémoires,
précise que sa mère la traitait de "sale petite bâtarde" ...),
ce qui expliquerait la volonté du comte de Joinville de se débarrasser de cette
enfant ...
Notes et références[modifier | modifier
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1. ↑ Maria
Stella Petronilla Chiappini Newborough, Maria Stella ou échange
criminel d'une demoiselle du plus haut rang contre un garçon de la condition la
plus vile, 1830 (lire en ligne [archive]), p. 89-90
Bibliographie[modifier | modifier
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·
A. Castelot : Philippe Égalité, le prince rouge, Libr.
Acad. Perrin (voir en particulier l'appendice, relatant en plusieurs chapitres
les recherches et conclusions menées par cet historien).
·
M. Vitrac : Philippe Egalité et M. Chiappini : Histoire
d’une substitution, Ed. Daragon, 1907, pp. 127 et s.
·
La baronne de Sternberg, Historia.
·
J. Marseille & N. Laneyrie-Dagen : Les grandes énigmes,
Larousse 1992.
·
R. Ambelain, Crimes et secrets d'état 1785-1830, Robert
Laffont, 1980 (voir, en particulier, le chapitre intitulé : Le secret de
la naissance de Louis-Philippe, contestant les conclusions du livre d'André
Castelot, cité ci-dessus)
·
A. Dumas "Mes Mémoires" 1802-1830, Robert Laffont, Paris, 1989,
coll. "Bouquins" pp.613 et ss.